Cher ouah, je trouve encore en moi la force de t’écrire. Mais sache que cette quête est véritablement éprouvante. Parfois, quand le tonnerre gronde et que les météorites en feu tombent autour de moi, j’ai l’effroyable sentiment que je n’arriverai jamais à trouver le seul et unique Schnibble.




Après 20 jours à suivre toujours le même chemin, la végétation est devenue plus luxuriante. Le décor, qui s’était éclairci à la sortie de la ville, commençait à se parer de couleurs de plus en plus vives. Du pourpre, du vert, du violet, du rose, du rouge, de l’orange, du bleu. Je n’en croyais plus mes yeux tant ces couleurs étaient belles. Ebloui, je me suis détourné du chemin qui mène au Saint-Schnibble. (Il n’y a pas vraiment de chemin à proprement parler comme les dalles violettes à la sortie de la ville, en réalité j’ai toujours marché tout droit.).



J’ai choisi de m’approcher un petit plus de ces plantes luxuriantes. Face à la beauté d’un pétunia rose et magenta, je n’ai pu m’empêcher de pleurer. J’ai voulu sentir son odeur. Peu à peu je me suis avancé. Et avant que je n’ai le temps de toucher l’une de ses feuilles, j’ai reçu un jet d’encre sur la trompe. J’ai essayé de l’essuyer hâtivement et, sans que je comprenne pourquoi ni comment, je me suis retrouvé la tête planté dans la terre l’instant qui suivit. Une autre plante a surement utilisé ses tentacules pour me faire tomber pendant ce laps de temps.

Je te passe les détails de mon humiliation. J’ai réussi à m’en sortir et je me suis juré de ne plus jamais me laisser aveugler par la beauté superficielle. J’ai quitté ce traquenard végétal. J’ai couru, encore et encore, jusqu’à ne plus voir ne serait-ce qu’un seul brin de végétation. J’ai atterri dans une sorte d’immense clairière sèche. 


La terre craque sous mes pieds quand je marche. Des météorites de feu tombent tous les jours autour de moi. Il n’y a rien à manger. Je suis obligé de m’aventurer dans les contrées de plantes luxuriantes pour trouver quelques misérables baies. Et si cette clairière n’est pas entourée que par les fleurs du mal, je préfère ne pas évoquer les autres territoires qui l’encerclent. Ils sont plus terribles les uns que les autres. Et, de toute façon, je n’ai jamais eu le courage de m’y aventurer vraiment. Hors de la ville, aucun lieu n’est sûr.



Tu imagines peut-être que face à l’adversité, nous sommes devenus plus solidaires entre bouzouks. Mais ce n’est pas le cas. Les plus forts d’entre nous forcent les plus faibles à aller chercher des baies pour eux dans les contrées aux végétations assassines. Mais aucun d’entre nous ne vit dans l’opulence dans ce lieu. Nous sommes tous condamnés à la misère.



L’autre jour, j’ai même croisé un bouzouk immobile, affalé sur le sol sans bouger. Ça ne m’a pas choqué au début jusqu’à ce que je me rappelle que je l’avais déjà vu au même endroit, dans la même position, la veille, et l’avant-veille. Même sa cage thoracique ne bougeait plus. J’ai alors demandé à un camarade retrouvé ce qui lui était arrivé.



-Bah on’sait pas, hein. P’sonne y sait ça. D’t’façon c’est pas l’premier qui tombe comme ça, hein. Alor’ on f’pus attention, hein. 


J’étais interloqué. D’une part, j’étais effaré d’entendre un accent aussi horrible que celui-ci. La quête ne fait du bien à personne. Et surtout, je me demandais ce qui finissait par arriver aux corps de ceux qui tombaient sur le sol.



-Parce que ça arrive souvent ? Et qu’est-ce qu’on fait de leur corps après ?

-Baaaaaah Bouziator, il d’sait qu’au bout d’kah an qu’t’es ici, t’finis t’jours par tomber. Après, ck’y tombent, y f’niss par s’levé et courrir dans l’bois.


Ainsi, la perspective de mon avenir en quête est peu enviable. Il semble évident que je vais finir par tomber par terre moi aussi. Après quoi je ne bougerai pas pendant des mois avant de me réveiller, de courir comme un dératé et de disparaître je ne sais où.



Mais il y avait, dans les propos de ce bouzouk écervelé, quelque chose qui m’a donné de l’espoir.



-Bouziator ? Il est ici ?

-Nan. L’est parti y’a ps’eurs mois vers kah grotte av’c des lumières vertes et fluos.

Un ancien Grand-Prêtre de la Secte du Schnibble était donc passé par ici. Finalement, je suis peut-être bien près du seul et unique Schnibble.


Cher ouah, cette grotte est mon seul espoir. Si je m’y rend pas au plus tôt, je finirai totalement débile.

Ce soir, je vais prier. Et demain, je m’aventurerai vers ce qui est peut-être, mon dernier voyage.


   =>   0 commentaire

Cher ouah , à l'heure où je te parle, je suis toujours en pleine quête du Schnibble. Et non, je ne prévois pas de rentrer sur la Colline Pourpre.

Pour autant, si je prends la peine de t’envoyer ce message par pioupiouk voyageur, c'est bien que j’ai quelque chose d’important à te dire.

Cela fait tout juste deux semaines que je suis parti en quête. J’ai écouté les conseils de matou7. Je suis allé à l’extérieur des murs. J’ai suivi et compté les bornes violettes. J’ai marché sur le chemin en pierres jaunes. A chaque intersection j’ai continué tout droit jusqu’à ce que je voie un chemin avec un Schnibble vert incrusté. J’ai tourné à cet angle. Je me suis arrêté à la 77éme borne violette. J’ai regardé mon tobozon portatif. Il n’indiquait pas 7,7 MegaSieverts alors j’ai continué ma marche jusqu’à ce qu’il le fasse. Ma trompe a commencé à prendre des reflets bleuâtres. Et là, j’ai vu un joli cabanon vert. J’y suis entré. J’y ai vu un portrait de la Grande Prêtresse T3kila et j’ai su, alors, que c’était à cet instant que ma quête commençait réellement.

Après être sorti de la cabane, le monde n’était pas si différent des paysages de la Colline Pourpre. Certes, le décor s’était un peu vidé jusqu’à ce que j’atteigne la 77éme borne violette. Il y avait moins d’arbres radioactifs, moins de zozios cyclopes. Mais il y avait surtout moins de cris inondant les rues, moins de mendiants, moins d’agitation vaine, moins de guerre idéologique plus vieille que la radioactivité.

J’ai marché seul la première semaine. J’ai regardé les étoiles. On les voit bien mieux sans les éclairages abusifs de la ville. Je vous dirais bien que j’y ai vu la direction à prendre pour trouver le seul et unique Schnibble mais ça n’est pas arrivé. Je vous dirais avec plaisir qu’elles m’ont fait réfléchir sur le sens de la vie citoyenne mais ce serait faux. Je vous dirais bien qu’elles m’ont fait réfléchir sur le sens de la vie en quête mais ce serait vous mentir. Les étoiles ne m’ont pas fait réfléchir. Elles m’ont fait oublier.

Les étoiles m’ont fait oublier qui j’étais, comme je m’étais retrouvé sur ce chemin et même ce que j’y cherchais. Et c’est dans ce moment d’absence qu’une zoukette m’a interpelé.



-Elles sont belles hein ?

-De quoi ?

-Elles sont belles, les étoiles.

-De quoi ?

Elle m’a regardé avec un air de décrépitude. 



-T’es con ou tu le fais exprès ?

-De quoi ?



Elle s’est avancée vers moi, elle m’a foutu une baffe et m’a reposé une question.



-C’est quoi ton nom ?

-Loup-Karouk, dis-je en palpant ma joue pour voir si elle était toujours là.

-Tu fais quoi ici ?

-Je suis en plein milieu d’un voyage initiatique et je cherche le véritable Schnibble.

-Pour quoi faire ?

Là, je dois avouer que j’ai pas vraiment su répondre. Et j’avais pas non plus envie de déballer ma vie devant cette inconnue.



-Baaaaaaaah … euuuuuuuuuuuh …. Comme tout le monde le cherche … du coup … bah j’me suis dit … moi aussi j’vais le chercher.

-Tu sais ce que tout le monde cherche en réalité ?

-Non. C’est quoi ?

-L’Amour.



Tu penses bien que je m’attendais pas à cette réponse ! Moi qui avais tout fait pour éviter cette épineuse question durant l’intégralité de ma vie citoyenne ! J’avais toujours refusé les avances de Pincemi et j’avais même réussi à repousser ce repas romantique avec Catzoukette jusqu’à ce que je parte ici ! Alors là, j’étais tout décontenancé et j’ai même pas su quoi répondre !



Elle a alors profité de mon hésitation pour me sauter dessus et me couvrir de baisers. Au début, je voulais réagir comme avec Catzoukette, lui foutre une torgnole et partir en courant. Et puis finalement, je sais pas trop ce qui m’a pris mais j’ai cédé dans ses bras.



J’ai passé la nuit avec elle. Et après ça, je ne voulais plus repartir. Le lendemain matin, je lui ai dit que je l’aimais en caressant sa trompe et elle m’a repoussé comme si je n’étais rien de plus qu’un pauvre pioupiouk d’égouts.



-Ne le prend pas mal, Loup-Karouk. Mais tu sais, … moi … je préfère les histoires courtes. En plus, les bouzouks qui passent sur cette route sont tous désemparés, solitaire, faciles à manipuler. Alors j’suis une reine ici moi. Du coup, c’est pour ça, Loup-Karouk, tu peux pas rester.




Ne pars pas en quête ouah ! J’ai l’effroyable sentiment que la quête du Schnibble n’est pas un chemin vers la salvation, mais bien la route vers l’enfer !

   =>   0 commentaire

Bouzouks,

Il y a longtemps, je suis arrivé à Vlurxtrznbnaxl. J'étais seul et Miss Augine venait de me jeter hors de sa classe.

Mon histoire a commencé à la Secte du Schnibble où j'ai rencontré Fuyuzora, T3kila et Pincemi. Fuyuzora qui deviendra un mentor. T3kila qui sera mon amie sincère jusqu'au bout. Pincemi qui restera mon ennemie jusqu'à la fin. Et je n'oublie pas ouah qui a été mon je-ne-sais-quoi. Ces quatre bouzouks résument parfaitement ce que j'ai tenté d'être.

J'ai été girouette, vendu, hypocrite, maire de la ville, corrompu, enstrulé, sectaire, censeur, buzinesszouk, collectionneur d'objets rares et même MLBiste. C'est la preuve que j'ai fait le tour de la Colline et j'ai vu toutes ses facettes. Pourpre, elle est aussi rouge, jaune, verte et bleue. Mais ne vous inquiétez pas, ce n'est pas la raki qui me fait dire ça.

Dans cette lettre que je vous adresse, je dois vous dire qu'on ne se reverra plus. Mais au lieu de ça, je préfère vous dire au revoir parce que rien ne dit qu'après avoir trouver le Schnibble, je ne reviendrais pas. Cet au revoir, je vous le dis pour donner du sens à ma décision de partir et ne plus revenir. Pour rendre irréversible ce grand voyage que je vais faire. Ce dernier grand voyage que j'entreprends aujourd'hui.

Au moment où j'écris cette lettre, je suis envahi d'une joie immense. La joie de partir autre part. Le joie de faire autre chose. La joie de vous dire au revoir. La joie de rejoindre ceux qui sont partis et la joie de revoir, peut-être, Suddenly. Qui sait ?

A l'heure où j'écris ces lignes, je n'ai plus aucun reproche à formuler. Mes regrets, je les laisse derrière moi et mes rivalités ne sont plus rien.
Mon opposant ! Mon concurrent ! Mon ennemi ! Mon adversaire ! Toi, le malfaisant ! Toi, le magnifique ! Oui, toi qui veux me retenir ! Arrête un peu et dépose les armes. Respire, abandonne et pense à moi. Ferme les yeux et oublie-moi. Car, mon ami, j'arrête là. Cette bataille n'est plus la mienne et je fuis le champ. Pour moi, c'est la fin et je joue avec plaisir ma dernière scène.

Quel bonheur et que de retrouvailles m'attendent ! Tant sont partis et tant attendent d'être retrouvés !

Maintenant, il faut que je termine cette lettre et je ne sais plus trop quoi vous écrire. Quels peuvent être mes derniers mots ? Et puis, qu'importe ! Puisqu'il faut bien vous les écrire, je vais le faire !
J'ai passé mon temps à écrire une histoire. Maintenant qu'il faut y mettre un terme, je me demande ce qu'elle aurait pu être. Mais, je suis heureux de ce qu'elle a été et je suis heureux de ce que nous avons été. Car, si j'ai été l'auteur de mon histoire, vous en avez été les formidables personnages. Pour ça, je vous remercie sincèrement. Pour tout le reste, je n'ai plus de mots.

   =>   11 commentaires