Cher ouah, cette lettre est probablement la dernière que je t’envoie. Je suis entré dans la grotte aux lumières vertes et fluorescentes et je crois bien que même la Grande Prêtresse n’a aucune idée de ce que j’y ai vu.


J’ai senti la force du désespoir dès ce matin. A peine fus-je réveillé qu’une météorite s’est écrasé à tout juste kah mètre de moi. Je n’ose même pas imaginer ce qui me serait arrivé si elle était tombée sur ma trompe.

J’ai essayé de pousser certains de mes camarades bouzouks à m’accompagner vers ce qui semble être notre seul salut possible mais aucun d’entre eux n’a voulu me suivre. Cela ne fait que quelques jours que je vis au sein de cette clairière sèche et brulante et déjà, je sens mon neurone perdre en vigueur. Certains disent que c’est à cause des phéromones dégagées par les plantes avoisinantes mais je n’y crois pas. Peu de choses vraies sortent de la bouche des autres quêtards. Pour te donner un exemple, ils ont essayé de me convaincre que les météorites naissaient à partir de graines de pothok.

Cette terre de feu, si violente, les a rendus barbares. Même à Vlurx’ nous sommes plus civilisés. Chaque jour, des bouzouks se battent entre eux. La dernière fois, le premier accusait le second de lui avoir volé de l’air. Il s’est alors servi de la tête de l’autre pour casser en deux une sorte de kahuète qu’il avait trouvée la veille.

J’aurais moi aussi succombé à cette crétinerie si je n’avais pas reçu d’aide. A peine fus-je arrivé dans cette clairière qu’un grand bouzouk m’a molesté pour me forcer à aller chercher des baies à sa place. Je n’ai réussi à le battre que grâce à l’intervention providentielle d’un pioupiouk. Il est arrivé furtivement et a mordu les fesses de mon agresseur, ce qui m’a alors laissé le temps de lui tordre la trompe si violemment qu’il en est tombé par terre.

J’ai beaucoup de chance que ce pioupiouk a choisi de me défendre. Sans lui, je ne t’aurai même jamais écrit ces lettres puisque ce sont des membres de sa meute qui te les portent.


Alors, dès mon réveil, je me suis dirigé vers cette grotte aux lumières vertes et fluorescentes. Je suis entré et les lumières y sont devenues plus vives qu’à l’extérieur. Il est impossible pour moi de dire d’où elles proviennent mais elles sont belles et bien là. Et puis, à force d’avancer lentement et d’étudier chaque aspérité de la grotte. J’ai distingué comme une légère fumée au fond. Je me suis avancé, et soudain, quelque chose a attrapé ma jambe gauche et m’a fait vaciller.

Face contre terre, j’ai essayé de me relever mais un immense poids m’est tombé sur le dos. J’ai perdu connaissance. Avant que ne ferme les yeux, je me souviens que les lumières ont changé de couleur. Elles sont devenues rouges.

A mon réveil, aucun signe de douleur n’était détectable. Je n’avais pas mal au dos ni à la tête. Et les lumières vertes et fluorescentes étaient à nouveau là. C’était comme si rien ne s’était passé. J’ai voulu avancer jusqu’au fond de la grotte. Le vert devenait, petit à petit, de plus en plus envahissant. C’était comme si j’entrais totalement dans un monde Schnibblique. De la fumée a surgi de nulle part et je ne voyais plus mes pieds. C’est alors qu’une voix tonitruante m’a adressé la parole.

-Loup-Karouk

Je suis resté sur place, estomaqué. Je n’osais plus bouger tant cette voix était imposante.

-Tu as vécu une existence citoyenne et une quête bien remplies. J’espère que tu es prêt pour ton dernier voyage.

La fumée s’est dissipée, et un escalier en pierre est apparu au fond de la grotte. Il est immense. Il est tellement long que l’on n’en voit pas la fin. J’ai commencé à m’approcher de l’escalier et la fumée m’a enveloppé une fois de plus.

-Mais attention, dit la voix. A chaque marche grimpée, tes neurones se multiplieront, ta sagesse grandira, ta connaissance de la complexité holistique, spirituelle et physique de l’univers s’améliorera. Dans le même temps, tu deviendras de plus en plus toi-même, de moins en moins Loup-Karouk, et tu t’uniras avec le Schnibble.

La fumée recommença alors à se dissiper et je m’apprêtais à faire ce dernier voyage avant qu’il ne reprenne la parole.

-Si le Schnnible t’accepte. Tu parviendras en haut de l’escalier. Et tu feras face à un choix. L’union ou le recommencement.

J’étais prêt à partir. Prêt à affronter cet ultime voyage avant que les remords ne me saisissent. Je ne pouvais pas m’en aller sans communiquer cette aventure.


Cher ouah, j’ai retardé de quelques instants ce voyage illuminé par le Schnibble pour t’écrire cette ultime lettre. Je ne reviendrais probablement jamais à Vlurxtrznbnaxl. Je te souhaite la plus belle des existences citoyennes. Je m’en vais. Adieu.

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La Vorace

Dès sa naissance, il y a environ 10 mois, Nabuee a toute suite su se caractériser des autres bouzouks par sa fascinante capacité à dévorer toute la bouffe qui lui passait sous la trompe, avec une préférence nette pour les kahuètes, dont la production a du quasi tripler pour pallier aux besoins de la zoukette, ce qui a plus tard amené ses amis et connaissances à la surnommer "la Vorace".

En effet, il semblerait que Nabuee soit dotée d'un système digestif lui permettant d'ingérer des quantités astronomiques de bouffe sans avoir le besoin de s'arrêter.

Hypothèse scientifiK

Nous allons ici essayer de répondre à la grande question: "Comment ?" Ou comment fait Nabuee pour réussir à ingérer tant de bouffe sans vomir ses tripes ?

Bien, voici le chez-ma de l'estomac d'un bouzouk lambda, trouvé dans la ruelle:

Comme vous pouvez l'observer, l'estomac de ce bouzouk lambda dispose d'une capacité limitée équivalent à environ 3 plats de Spaggiouli, ce qui est loin d'être le cas de celui de notre Nabuee .

Après une rencontre avec des scientifouilles diplômés et une réflexion intense, j'ai pu poser une hypothèse valable que je vais démontrer a partir de ce chez-ma supposé de l'estomac de Nabuee :

Comme on peux le voir sur l'image, l'estomac de Nabuee ferait la même circonférence que celui d'un bouzouk lambda, et serait composé de la même matière que l'estomac lambda, à l'exception d'un gros trou noir présent au centre, qui permettrait à Nabuee de manger continuellement sans pour autant être repue.

L'addiction pour les kahuètes

Nous allons maintenant parler de la préférence évidente de Nabuee pour les kahuètes, lesquelles comme je l'ai dit plus haut ont connu une production presque triplée, ce qui a permis aux entreprises productrices de kahuètes de connaître une croissance sans précédent, et est actuellement une aubaine pour l'activité économique de notre ville.

KAHièrement les propriétés physiques des kahuètes permettraient à Nabuee de les gober de manière rapide, ce qui offrirait à son neurone la possibilité de croire que son appétit infini pourrait être comblé plus rapidement, et ainsi lui permettre d'être enfin repue, ce qui n'est toujours pas le cas d'après les dernières informations reçues d'ailleurs.

ZIGièmement, il semblerait que la Nabuee ait une préférence gustative pour les kahuètes, dont le petit goût salé pourrait lui éveiller les papilles, et ainsi justifierait ce que j'oserais appeler addiction pour les kahuètes.

Qu'en penser ?

Nabuee aurait donc en toute vraisemblance l'étonnante capacité de pouvoir manger infiniment, sans pour autant grossir, grâce à son estomac disposant d'un trou noir intégré, et est aujourd'hui pour notre ville un atout économique, qui, en cas de crise financière, pourrait permettre à toutes les entreprises de se reconvertir dans la production de kahuètes et ainsi bénéficier du mouvement de croissance et demeure un atout scientifiK pour la recherche.

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Cher ouah, je trouve encore en moi la force de t’écrire. Mais sache que cette quête est véritablement éprouvante. Parfois, quand le tonnerre gronde et que les météorites en feu tombent autour de moi, j’ai l’effroyable sentiment que je n’arriverai jamais à trouver le seul et unique Schnibble.




Après 20 jours à suivre toujours le même chemin, la végétation est devenue plus luxuriante. Le décor, qui s’était éclairci à la sortie de la ville, commençait à se parer de couleurs de plus en plus vives. Du pourpre, du vert, du violet, du rose, du rouge, de l’orange, du bleu. Je n’en croyais plus mes yeux tant ces couleurs étaient belles. Ebloui, je me suis détourné du chemin qui mène au Saint-Schnibble. (Il n’y a pas vraiment de chemin à proprement parler comme les dalles violettes à la sortie de la ville, en réalité j’ai toujours marché tout droit.).



J’ai choisi de m’approcher un petit plus de ces plantes luxuriantes. Face à la beauté d’un pétunia rose et magenta, je n’ai pu m’empêcher de pleurer. J’ai voulu sentir son odeur. Peu à peu je me suis avancé. Et avant que je n’ai le temps de toucher l’une de ses feuilles, j’ai reçu un jet d’encre sur la trompe. J’ai essayé de l’essuyer hâtivement et, sans que je comprenne pourquoi ni comment, je me suis retrouvé la tête planté dans la terre l’instant qui suivit. Une autre plante a surement utilisé ses tentacules pour me faire tomber pendant ce laps de temps.

Je te passe les détails de mon humiliation. J’ai réussi à m’en sortir et je me suis juré de ne plus jamais me laisser aveugler par la beauté superficielle. J’ai quitté ce traquenard végétal. J’ai couru, encore et encore, jusqu’à ne plus voir ne serait-ce qu’un seul brin de végétation. J’ai atterri dans une sorte d’immense clairière sèche. 


La terre craque sous mes pieds quand je marche. Des météorites de feu tombent tous les jours autour de moi. Il n’y a rien à manger. Je suis obligé de m’aventurer dans les contrées de plantes luxuriantes pour trouver quelques misérables baies. Et si cette clairière n’est pas entourée que par les fleurs du mal, je préfère ne pas évoquer les autres territoires qui l’encerclent. Ils sont plus terribles les uns que les autres. Et, de toute façon, je n’ai jamais eu le courage de m’y aventurer vraiment. Hors de la ville, aucun lieu n’est sûr.



Tu imagines peut-être que face à l’adversité, nous sommes devenus plus solidaires entre bouzouks. Mais ce n’est pas le cas. Les plus forts d’entre nous forcent les plus faibles à aller chercher des baies pour eux dans les contrées aux végétations assassines. Mais aucun d’entre nous ne vit dans l’opulence dans ce lieu. Nous sommes tous condamnés à la misère.



L’autre jour, j’ai même croisé un bouzouk immobile, affalé sur le sol sans bouger. Ça ne m’a pas choqué au début jusqu’à ce que je me rappelle que je l’avais déjà vu au même endroit, dans la même position, la veille, et l’avant-veille. Même sa cage thoracique ne bougeait plus. J’ai alors demandé à un camarade retrouvé ce qui lui était arrivé.



-Bah on’sait pas, hein. P’sonne y sait ça. D’t’façon c’est pas l’premier qui tombe comme ça, hein. Alor’ on f’pus attention, hein. 


J’étais interloqué. D’une part, j’étais effaré d’entendre un accent aussi horrible que celui-ci. La quête ne fait du bien à personne. Et surtout, je me demandais ce qui finissait par arriver aux corps de ceux qui tombaient sur le sol.



-Parce que ça arrive souvent ? Et qu’est-ce qu’on fait de leur corps après ?

-Baaaaaah Bouziator, il d’sait qu’au bout d’kah an qu’t’es ici, t’finis t’jours par tomber. Après, ck’y tombent, y f’niss par s’levé et courrir dans l’bois.


Ainsi, la perspective de mon avenir en quête est peu enviable. Il semble évident que je vais finir par tomber par terre moi aussi. Après quoi je ne bougerai pas pendant des mois avant de me réveiller, de courir comme un dératé et de disparaître je ne sais où.



Mais il y avait, dans les propos de ce bouzouk écervelé, quelque chose qui m’a donné de l’espoir.



-Bouziator ? Il est ici ?

-Nan. L’est parti y’a ps’eurs mois vers kah grotte av’c des lumières vertes et fluos.

Un ancien Grand-Prêtre de la Secte du Schnibble était donc passé par ici. Finalement, je suis peut-être bien près du seul et unique Schnibble.


Cher ouah, cette grotte est mon seul espoir. Si je m’y rend pas au plus tôt, je finirai totalement débile.

Ce soir, je vais prier. Et demain, je m’aventurerai vers ce qui est peut-être, mon dernier voyage.


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